Les émotions, parfois appelées passions, affects ou encore états d’âme font régulièrement l’objet de réflexions, notamment en philosophie. Selon des rythmes différents, de très nombreuses disciplines relevant du périmètre de la MSHS de Poitiers se sont emparées de la question des émotions: la psychologie, la philosophie, la littérature, l’histoire, l’économie, la sociologie, la linguistique ou la géographie… D’autres domaines comme la médecine et le droit, s’y intéressent également. Selon les disciplines, les émotions sont classées en fonction de leur rationalité, selon une taxinomie qui part des émotions « les plus agréables » pour aller vers les plus désagréables, en passant par celles qualifiées de « neutres » ou de catégoriser les émotions selon leur intensité (en fonction d’expressions faciales et/ou corporelles) ou la manière dont elles permettent aux hommes et aux femmes de se mouvoir dans le monde social à un moment donné… Pour mieux étudier celles-ci, nous proposons de les regrouper selon trois ensembles destiné à favoriser les échanges autour d’un objet commun et d’en préciser les contours, les usages et les enjeux heuristiques. Les Ardentes : colère, liesse, amour, joie, peur, effroi, jalousie, admiration, surprise… Ces émotions pousseraient l’individu à agir de manière souvent involontaire et rapide, qu’il soit isolé ou en groupe. D’intensités fortes, « les Ardentes » se manifestent par des manifestations comportementales et verbales puissantes. A ce titre, elles ont été longtemps considérées comme inappropriées en tant que passions (destructrices) opposées à la raison. Toutefois, elles peuvent être sources de motivations humaines qui, à l’échelle d’un individu ou d’une société, permettent une avancée finalement salutaire dans l’adaptation à son environnement physique et social. Les Morales : indignation, honte, culpabilité… Scandales, massacres, famines, provocations verbales, agressions… suscitent des réactions variées, allant de l’indifférence à la protestation. Par exemple, on peut distinguer « l’indignation qui rassemble », « l’indignation qui divise » et « l’indignation qui trouble ». « Les Morales » peuvent correspondre à une « conscience outragée » face à une situation révélée. Elles sont parfois limitées à l’individu ou exprimées dans l’espace public en mobilisant des groupes ou des catégories plus ou moins importants. Sans doute « les Morales » mettent-elles en jeu l’image de soi, des valeurs ou des références, et conduisent, soit à se dérober, soit à agir. Elles peuvent aussi s’exprimer sur tous les tons et de toutes les façons mais sont tributaires d’une époque et d’une société. Les Brumeuses : tristesse, mélancolie, détresse, ennui, dégout, mépris… Latentes ou sournoises, « les Brumeuses » déstabilisent par les sentiments et les manifestations doucement amers qu’elles peuvent susciter. Leur complexité peut tenir à la langueur qui envahit l’individu ou le groupe d’individus de manière diffuse, parfois sans objet et sans contour précis. « Les Brumeuses » correspondent ont plus ou moins d’intensité, immobilisent souvent les individus ou les sociétés en les enfermant dans un avant, un regret ou un impossible.